Seule restait la certitude que la République avait failli et certains s’engouffrèrent dans la brèche soit pour réclamer un Etat de plus en plus sécuritaire et autoritaire, soit pour saper encore un peu plus la légitimité de la puissance publique, que l’idéologie néo-libérale marchéïste avait discréditée et mise à mal depuis déjà tant d’années. La République en tant que telle n’y était pour rien. Sa devise « Liberté, Egalité, Fraternité « , toujours visible au fronton des bâtiments publics, continuait de désigner la direction vers laquelle devaient tendre idéalement les actions humaines. Qu’en avaient fait les politiques qui avaient eu la responsabilité du pouvoir? Tous pourris, avait tranché le peuple en choisissant comme chef de l’Etat, en 2022, la présidente du Front national Marine Le Pen, fille du célèbre Jean-Marie qui avait pu s’illustrer pendant des décennies, sans réaction forte de la part des autorités républicaines, par des discours xénophobes et de multiples prises de position antisémites et racistes. Les politiciens avaient pris l’habitude de stigmatiser le populisme sans chercher à comprendre les raisons profondes de ce vote, alors que le président François Hollande, en 2015, sur une chaîne télévisuelle de grande écoute, avait lui-même, d’une certaine façon, légitimé le Front national en le comparant au parti communiste français des années 1970, dont les thèses souverainistes – acheter Français – étaient déjà destinées à protéger les emplois menacés de l’époque et à endiguer la maladie endémique du chômage dont les ravages ne faisaient, hélas, que commencer. Car l’axe du Mal, chez les pays riches, était plutôt celui-là, la mise à l’écart d’une partie importante de la population qui n’avait plus accès au marché du travail. Les mesures sociales amortissaient certes les chocs provoqués dans les vies individuelles par l’absence de travail et de ressources pour vivre, mais le manque de perspectives d’avenir – no future – avait fini par gangrener durablement l’ensemble de la société dans ce que l’on avait appelé, vers la fin du vingtième siècle, la cohésion sociale, quand l’idée de contrat social était sans doute apparue désuète aux yeux des économistes modernes, à moins que ce ne fût, par sa référence directe au siècle des Lumières, trop révolutionnaire (?!) …
tendre
Formes et couleurs
Vert tendre
ronde la pomme
rouge l’oiseau
dans le jardin bleu
sous les nuages blancs
à l’ombre de mon arbre
Le bruit léger de mes pas
La campagne est silencieuse
et immobile, aucun souffle n’agite
les feuillages encore tendres
contre le front du ciel gris
si pâle aujourd’hui, tristesse
de la couleur absente, joie
de la marche libre, au coeur
de la vie qui bat, au loin
le clocher du village
et les maisons regroupées
sous les nuages bas
et lourds
bientôt, le crépitement de la pluie
accompagnera
le bruit étouffé de mes pas
Le réel et l’inimaginable
Ce geste tendre
ta main si douce
rien ne pourra jamais l’empêcher…
Ce baiser sur le front
ton rire aux éclats
rien ne pourra jamais l’empêcher…
Nos départs à l’aurore
nos promenades paisibles
l’émerveillement partagé…
Rien ne pourra jamais l’empêcher.
Un écho, dans le coeur, répond à la beauté du monde. Les couleurs or et pourpre de l’automne, comme celles du crépuscule, magnifient l’approche de l’hiver et de la nuit.
Quand il fera noir et très froid, il faudra essayer de ne pas avoir trop peur…
Au volant, en passant
La vitesse
ouvre l’espace
la route invente
un cinéma monotone
au décor immuable
seul le ciel change
et les saisons
aujourd’hui, le paysage est vert et jaune
autour de quelques éoliennes blanches
qui jalonnent le trajet
le soleil se couche en beauté
comme j’aimerais le faire
le soir de mon dernier souffle
la lumière est plus belle que le jour
avant la nuit
plus tendres sont les amours
au crépuscule
un parfum se répand
de fleurs caressées par le vent
dans l’habitacle de la voiture
l’air est léger
de chaque côté de la route
on dirait que les arbres ont envie de danser
Au carrefour de l’impensable
[ La nuit est tombée sur nous, la nuit est tombée sur l’Humanité… Personne ne voulait croire cela possible… Nous vivions dans une épaisseur d’indifférence qui vitrifiait nos émotions. Nos émotions étaient vitrifiées! Sinon, comment expliquer?…
Des fous ont pris, au carrefour de l’impensable, la direction de l’inimaginable… Les puissants payaient leur combustible au prix de la vie des damnés!… Mon cœur est lourd et fermé, mes yeux pleurent de rage…
La planète bleue a été pressée comme une orange morte… Les terres ruisselaient d’eau vive, mais les machines des hommes broyaient tout pour les siècles des siècles!… Le chant du rossignol nous chavirait le cœur… Nous n’étions pas chez nous, hôtes passagers de la Terre!… Comme des furies, nous dansions avec la mort…
Lumière du matin, nos lèvres cueillaient la rosée à tes lèvres, baiser tendre du jour à la vie frémissante!… Je plongeais les mains dans l’eau argentée, l’or de la lumière coulait entre mes doigts, l’air pur et léger tremblait d’azur, mon coeur tremblait d’amour!…
Les corps croyaient avoir une âme au diapason des dieux… La nuit est tombée sur nous, personne ne voulait croire cela possible… ]
Sans toi
Lueur zébrure nuit encre
heure bleue horizon fermeture rien
que le ciel rien
que la nuit rien
à l’horizon il me souvient tant
dans un jardin parfumé de jasmin
jadis
à l’heure tendre du crépuscule tendu de rose le rossignol chantait et ton cœur battait contre le mien
ce temps n’est plus il me souvient tant pourquoi s’en est-il allé ses ailes noires t’ont emporté dans la nuit obscure je veux aller pour te rejoindre et recommencer
jadis est une pierre précieuse dans la nuit noire de la mémoire en deuil de mille feux elle brille
jet d’eau de paroles et de larmes qui disent et pleurent l’absence faisceau de soupirs qui s’écoulent en silence sur le seuil de la maison vide poignée de pétales éparpillés sur les marches
il me souvient tant tant et tant de souvenirs disparaissent et s’éteignent les bouquets de souvenirs ont la beauté d’un feu d’artifice
Conte
Un banc dans un verger
j’ai perdu mes blancs moutons pleure une bergère
qui rêve d’amitié douce comme la laine
et de jours sans loups
son promis est parti à la guerre
Dieu seul sait quand il reviendra
pourquoi mon Dieu pourquoi pourquoi la vie espérée est-elle si tendre
mais si dur
le temps qui passe
elle fut retrouvée endormie sur le banc dans le verger
belle et souriante
mais ne se réveilla jamais